Six salariés sur 10 déplorent un manque de soutien psychologique : comment agir en tant que manager ?
Bien que les initiatives en matière de Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) soient en pleine croissance, l’importance accordée à la santé mentale n’est pas encore à la hauteur des enjeux. S’ils ne sont pas des professionnels de la santé, les managers ont un rôle à jouer pour détecter les signes de détresse chez leurs collaborateurs et les orienter vers le soutien approprié, tout en pilotant une politique volontariste à la faveur de la Santé et de la Qualité de Vie au Travail (SQVT). Décryptage…
Mal-être mental et manque de soutien : un constat partagé par les salariés… et les RH !
Selon le baromètre « C’est mon boulot » réalisé par Odoxa en 2018, 51 % des Français estiment que leur travail n’est pas reconnu à sa juste valeur. En 2022, cette proportion est passée à 74 % selon une enquête signée Moodwork. En cause : « soit les entreprises ont l’impression que la reconnaissance relève plus du management de proximité et moins du rôle de l’entreprise en elle-même, soit les attentes des salariés sont encore plus élevées », expliquent Clément Poirier et Margaux Gelin, docteurs en psychologie et chercheurs chez Moodwork.
Ce manque de reconnaissance n’est sans doute pas étranger à l’omniprésence d’un sentiment de mal-être mental en entreprise. En effet, selon une étude Alan x Harris Interactive, 90 % des salariés français estiment que les difficultés psychologiques « sont de plus en plus répandues au travail », et 63 % des actifs déplorent le manque de soutien de leurs supérieurs en matière de santé mentale.
Une enquête signée Axa a recueilli les impressions des professionnels des Ressources Humaines à ce sujet… et les avis convergent. En effet, 75 % des responsables RH affirment avoir vu la santé mentale des salariés se dégrader depuis quelques années.
La santé mentale, l’angle mort de la politique RSE des entreprises
De plus en plus d’entreprises intègrent sérieusement la RSE dans leur stratégie de développement, que ce soit sous l’impulsion d’une démarche volontariste ou par obligation légale. Si les initiatives RSE se multiplient, un angle mort subsiste : celui de la santé, et plus particulièrement de la santé mentale. En effet, la détresse psychologique, la dépression ou encore les troubles du sommeil continuent d’être ignorés par les managers et passés sous silence par les principaux intéressés.
Selon une étude de la Dares, 65 % des salariés français déclarent cacher leur mal-être et leurs émotions en entreprise… un silence motivé par « le culte de la performance », la crainte d’être pénalisé dans leur vie professionnelle et la peur du licenciement, comme l’explique une étude Malakoff Humanis. Pourtant, 76 % des salariés souhaitent que leur employeur agisse en faveur de leur santé mentale, selon un sondage d’OpinionWay.
Soutien psychologique : quelle posture face à un collaborateur en détresse ?
Les salariés étant peu expansifs sur leur mal-être et leur détresse psychologique, tout repose sur le sens de l’observation :
- Changement d’attitude ou de comportement : un salarié habituellement sociable et engagé peut commencer à se retirer et à éviter les interactions avec ses collègues. De même, une personne habituellement calme et posée peut commencer à faire preuve d’irritabilité ou d’agitation. Ces changements peuvent indiquer un stress accru ou d’autres problèmes de santé mentale ;
- Fluctuation de la performance professionnelle : un salarié en situation de mal-être peut avoir du mal à se concentrer, à prendre des décisions ou à accomplir ses tâches habituelles. Il peut commettre plus d’erreurs que d’habitude, manquer des délais ou montrer des problèmes de productivité. Ces difficultés peuvent être un signe de burnout ;
- Problèmes de présence au travail : un salarié en détresse peut commencer à arriver en retard, à quitter tôt ou à manquer des jours de travail. Il peut aussi faire preuve de « présentéisme », c’est-à-dire être physiquement présent au travail, mais être mentalement absent ou non productif ;
- Signes physiques de stress : il peut s’agir de maux de tête récurrents, de troubles du sommeil, de problèmes de digestion, de troubles d’appétit, etc.
Le manager n’est pas un professionnel de la santé, et il n’a pas vocation à diagnostiquer ou traiter ces troubles. S’il soupçonne un mal-être mental, la meilleure approche va alors consister à aborder la question avec son collaborateur :
- Engager la conversation avec bienveillance et empathie, par exemple en adoptant la technique SPIKES (Setting, Perception, Invitation, Knowledge, Emotions, Strategy and Summary). Choisissez un environnement adapté (Setting), évaluez la perception de l’employé sur sa situation (Perception), invitez-le à partager son ressenti (Invitation), partagez vos observations (Knowledge), répondez à ses émotions (Emotions) et discutez des prochaines étapes (Strategy and Summary) ;
- Évaluation des risques : si un collaborateur exprime des sentiments de détresse ou de désespoir, une évaluation des risques peut être nécessaire. Cela peut passer par une conversation plus approfondie sur ses sentiments, en cherchant des signaux d’alerte (idées noires, pensées suicidaires, apathie…). Si de tels signaux sont présents, il faut orienter le collaborateur vers une aide professionnelle en toute urgence ;
- Application des protocoles de l’entreprise : chaque entreprise devrait disposer d’un protocole pour répondre à la détresse mentale des employés, par exemple en impliquant les ressources humaines, en faisant appel à une ligne d’assistance en santé mentale ou en engageant un professionnel de la santé mentale pour une consultation ;
- Aménagements professionnels raisonnables : en consultation avec les RH et le collaborateur, envisagez des aménagements raisonnables pour l’aider à gérer son travail pendant cette phase. Il peut s’agir d’ajustements de l’emploi du temps, de modifications des responsabilités ou même d’un congé médical, le cas échéant ;
- Suivi structuré : mettez en place un plan de suivi avec des points de contrôle réguliers pour évaluer comment le collaborateur se porte et si les mesures de soutien sont efficaces. Il peut s’agir de réunions régulières avec le collaborateur, de discussions avec les RH et, si nécessaire, de consultations avec des professionnels de la santé mentale.
Prévention du mal-être au travail : l’importance d’une approche proactive
Si la détection et l’accompagnement des salariés en détresse sont des approches réactives indispensables, elles n’interviennent que lorsque le mal-être s’est déjà installé. C’est pourquoi les entreprises doivent adopter une approche proactive. L’objectif est de créer un environnement de travail sain et résilient qui favorise le bien-être mental, réduisant ainsi les risques de burnout et de mal-être au travail :
- Évaluation des risques psychosociaux : cette étape va mettre en lumière les facteurs de stress au travail et déployer des mesures pour les atténuer, par exemple avec des enquêtes anonymes, des entretiens individuels ou des focus groupes ;
- Promotion de la résilience : les entreprises peuvent organiser des ateliers ou des formations pour aider les employés à développer leur résilience. Il s’agit de les doter d’outils pour gérer le stress, comme des techniques de mindfulness, de relaxation ou de gestion du temps. L’approche de la thérapie cognitive comportementale (TCC) peut être particulièrement utile à cet égard ;
- Aménagement des espaces de travail, par exemple en intégrant des espaces de repos, des zones de silence pour se concentrer, faire entrer la lumière naturelle dans les espaces de travail, etc. ;
- Élaboration d’une politique de déconnexion : il est essentiel d’établir des règles claires sur la disponibilité des employés en dehors des heures de travail pour éviter le burnout. Cela peut passer par l’interdiction des emails professionnels en dehors des heures de travail, des périodes de « temps calme » sans réunions, etc. ;
- Mise en place d’une politique de retour au travail après une absence liée à un problème de santé mentale pour prévenir la récurrence du mal-être. Il peut s’agir d’un retour progressif au travail, d’un suivi par un professionnel de santé ou de la mise en place d’aménagements raisonnables.
Preventech Consulting, le partenaire SQVT des entreprises
Avec une expérience de plus de 17 ans dans la mise en place de stratégies et d’actions collectives et individuelles au service de la Santé et de la Qualité de Vie au Travail, le cabinet Preventech Consulting intervient auprès des entreprises pour aider les managers à adopter la bonne posture et à activer les bons leviers d’accompagnement de la santé mentale. Discutons de votre besoin !