Dans le monde professionnel, on entend bien souvent qu’il faut toujours rester rationnel et logique pour réussir. Se laisser guider par ses émotions peut encore être perçu comme un signe de faiblesse. L’idée selon laquelle les émotions entravent la raison n’est pas nouvelle et trouve son origine dans le dualisme cartésien, qui prône la séparation entre la raison et les émotions.
Le dualisme cartésien, formulé par René Descartes, établit une distinction claire entre l'esprit et le corps, et par extension, entre la raison et les émotions. Selon Descartes, la raison est vue comme le fondement de la pensée humaine, une entité purement logique et dépourvue d'émotions, qui serait capable de mener à la solution de tout problème si elle est correctement utilisée. Cette perspective positionne les émotions comme des épiphénomènes, des éléments secondaires et souvent perturbateurs de la pensée rationnelle. La prévalence de cette pensée dans le monde occidental a longtemps influencé la manière dont les émotions sont perçues dans divers domaines, y compris dans le milieu professionnel.
Contrairement à la vision cartésienne, les recherches contemporaines en neurologie et en psychologie cognitive ont démontré l'importance cruciale des émotions dans le fonctionnement cognitif. Antonio Damasio, dans son ouvrage, « L'Erreur de Descartes : la raison des émotions« , explique que les émotions jouent un rôle fondamental dans la prise de décision, le traitement de l'information, la communication et la mémoire. À travers plusieurs cas cliniques, Antonio Damasio illustre que les patients avec des dommages dans les régions du cerveau responsables des émotions présentent des difficultés à faire des choix logiques et judicieux, à prendre des décisions, à tirer des leçons des expériences de vie, et même à s’organiser au quotidien.
Ces découvertes montrent que les émotions ne constituent pas seulement des réponses physiologiques sans conséquence pour la cognition, mais correspondent aux composantes intégrales qui influencent notre manière de penser, de planifier et de résoudre des problèmes. En effet, les émotions aident à prioriser les actions, à motiver les comportements et à connecter des expériences passées avec des jugements et des évaluations, facilitant ainsi des décisions complexes dans des contextes incertains.
L’Intelligence Émotionnelle au cœur des relations professionnelles
C’est dans ce contexte que le concept de l’intelligence émotionnelle, développé et popularisé, entre autres chercheurs, par Daniel Goleman, prend toute son importance. Goleman avance que les compétences émotionnelles comme la conscience de soi, la régulation émotionnelle, l’empathie ou encore la gestion des conflits sont des piliers essentiels du leadership efficace. Cette perspective suggère que loin d’entraver la rationalité, les capacités émotionnelles la renforcent en permettant une meilleure compréhension et gestion des dynamiques humaines au sein des organisations.
Les récentes recherches mettent en évidence de nombreuses conséquences positives du haut niveau de l’intelligence émotionnelle dans la sphère professionnelle :
- Les personnes dotées d’une bonne intelligence émotionnelle sont moins susceptibles de développer un syndrome d’épuisement professionnel, sont globalement plus performantes et tolèrent mieux la pression émotionnelle (Higgs (2004) et Varca (2004)).
- Les personnes dotées d’une bonne intelligence émotionnelle sont plus sensibles aux émotions de leurs collègues et des clients et peuvent plus facilement apporter leur aide et soutien en favorisant un environnement de travail émotionnel positif (Brackett et al., 2010).
- La « maturité émotionnelle » des managers est associée à leur efficacité en tant que leaders. Le niveau élevé de l’intelligence émotionnelle des managers leur permet de s’engager dans des comportements de soutien et d’interactions positives en raison de leur sensibilité aux sentiments et émotions des autres. Ce type de comportements stimulerait les employés et favoriserait leur satisfaction au travail. (Bass, 1990).
- Le leadership transformationnel est souvent associé à un haut niveau d’intelligence émotionnelle (Riggio & Lee, 2007).
Chez Preventech Consulting, nous accompagnons nos clients désireux d’adopter un management éthique et responsable. Notre formation sur le leadership et l’intelligence émotionnelle permet aux managers de tous niveaux d’appréhender l’impact des émotions dans la sphère professionnelle et de développer des compétences émotionnelles favorisant la santé, le bien-être et la performance.
Sources :
- Damasio, A. (1994). L’erreur de Descartes : la raison des émotions. Odile Jacob.
- Goleman, D. (1995). Emotional Intelligence. New York: Basic Books.
- Lee, H. J. (2018). Influence de l’intelligence émotionnelle sur la satisfaction au travail et sur le syndrome d’épuisement professionnel dans les emplois du secteur public. Revue Internationale des Sciences Administratives, 84(4), 755-771.
- Varca, P. E. (2004). Service skills for service workers: Emotional intelligence and beyond. Managing Service Quality, 14(6), 457-467.
- Higgs, M. (2004). A study of the relationship between emotional intelligence and performance in UK call centers. Journal of Managerial Psychology, 19(4), 442-454.