L’identification des Troubles MusculoSquelettiques remonte aux années 70 et les premières recherches menées par l’INRS datent de la fin des années 80. Avec presque 40 ans de recul, notre compréhension des Troubles MusculoSquelettiques a progressé, mais les résultats de la prévention se font encore attendre.
L’impact des TMS est-il le même partout en Europe ?
Nous pouvons apporter deux réponses à cette question : si nous considérons que l’impact des TMS est avant tout, pour les entreprises, l’imputabilité et la reconnaissance en maladie professionnelles des TMS, l’impact est effectivement très différent en fonction du pays concerné. Roquelaure (2018)¹ remarque une distinction entre les pays disposant d’une liste de maladies professionnelles, dont l’imputation est a priori attribué au travail (tableau des maladies professionnelles du régime général et du régime agricole en France), et les pays ne disposant pas de telle liste. Le nombre d’affections répertoriées impacte également le taux de reconnaissance en maladie professionnelle.
Si nous considérons l’impact des TMS, pour les salariés et donc pour les entreprises, comme l’apparition de douleurs et de gènes fonctionnelles (principaux symptômes des TMS), alors nous pouvons définir que l’ensemble des pays européens sont touchés par TMS.
L’Agence Européenne pour la Sécurité et la Santé au Travail (2013) décrit un contexte de grande disparité en matière de processus de reconnaissance. L’ensemble des pays européenne ne disposent pas, comme en France, d’une liste de pathologies avec une présomption d’imputabilité au travail. Par exemple, en Espagne et en Finlande, l’accident de travail est la seule possibilité de prise en charge des lombalgies. En Finlande, les bursites du coude ou du genou sont une catégorie spécifique d’accident du travail. La Suède ne dispose pas de liste de maladie professionnelle et s’attache, dans le processus de reconnaissance, à « la charge de la preuve de l’implication » du travail dans la survenue des affections. A l’inverse, l’Espagne dispose d’une liste en dehors de laquelle il est impossible de faire reconnaître juridiquement une maladie professionnelle.
Roquelaure (2018) constate une différence notable dans les taux de reconnaissance de maladie professionnelle en fonction de l’existence ou non d’une liste nationale des maladies professionnel. Selon le rapport Eurogrip (2016), il existe une forte sous-déclaration dans certains pays européen en fonction d’un manque d’information des salariés, des procédures administratives trop lourdes ou encore face à la peur d’une perte d’emploi.
Pour autant, les enquêtes européennes sur les conditions de travail montre une épidémie d’ampleur importante. L’Agence Européenne pour la Sécurité et la Santé au Travail (2013) concluait déjà que 25% des travailleurs se plaignaient de lombalgie et 23% de douleurs musculaires. L’enquête Eurofound (2016) démontrait des données plus alarmantes encore, puisque environ un salarié européen sur deux se plaindrait de douleurs au niveau des cervicales, des épaules, ou de lombalgies. Les salariés les plus exposés seraient ceux travaillant sous une forte contrainte de temps, disposant de peu de marges de manœuvre, les ouvriers de l’industrie manufacturière et agroalimentaire, du secteur de la construction et de l’agriculture (Roquelaure 2018).
Les travailleurs âgés sont également particulièrement impactés, « du fait d’un vieillissement prématuré des tissus et des effets différés des contraintes biomécaniques accumulés au fil du parcours professionnel ».
On constate donc qu’au niveau Européen, la reconnaissance en maladie professionnelle des TMS est très différente. Pour autant, les effets des TMS sur la santé des salariés impactent l’ensemble des pays européen, indépendamment des processus de reconnaissance. Les facteurs professionnels sont prépondérants sur des facteurs législatifs.
¹Yves ROQUELAURE, Professeurs des Universités et praticien hospitalier. Responsable médical du Centre de ressources pour la recherche et la veille sanitaire en santé au travail. Chef de service pathologies professionnelles et santé au travail – Centre Hospitalier Universitaire d’Angers.
Par Cyril V., novembre 2019